Par Jean-Pierre Obin, membre du bureau exécutif de la Licra
(Article paru dans Le DDV n°682, mars 2021)
Pierre-André Taguieff rapporte ainsi une réplique de Julien Freund au président de son jury, lors de sa soutenance de thèse en 1965 :
« Vous pensez que c’est vous qui désignez l’ennemi, comme tous les pacifistes. Du moment que nous ne voulons pas d’ennemis, nous n’en aurons pas, raisonnez-vous. Or c’est l’ennemi qui vous désigne. Et s’il veut que vous soyez son ennemi, vous pouvez lui faire les plus belles protestations d’amitiés. Du moment qu’il veut que vous soyez son ennemi, vous l’êtes. Et il vous empêchera même de cultiver votre jardin[1]. »
Il faut bien nous y résoudre : nous avons désormais un ennemi, et même un « ennemi imprévu » selon le mot de Taguieff[2]. Nous ne l’avons pas choisi, c’est lui qui nous a désigné comme tel. Samuel Paty pensait simplement « cultiver son jardin », faire consciencieusement son métier. Il ne soupçonnait pas que cet ennemi le guettait, au sein même de sa classe. Comme à chaque fois que le terrorisme frappe la France, c’est d’abord l’horreur qui nous saisit. Puis vient le temps de la réflexion ; avec toujours les mêmes questions. Que nous arrive-t-il ? Quel est cet « ennemi » et que nous veut-il ? Et comment nous en défendre ? Après avoir longtemps nié tout danger, puis après 2015 tergiversé cinq ans pour le nommer (« radicalisation », « terrorisme », « communautarisme », « séparatisme »…), le pouvoir politique semble enfin s’être résolu à appeler un chat un chat et, comme tous les bons spécialistes de cette question, à désigner cet ennemi par son véritable nom : l’islamisme.
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