Mario Stasi, président de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra)
La Licra exprime sa plus vive inquiétude devant l’arrivée de 89 députés Rassemblement national dans l’hémicycle. Elle constate que ce parti va disposer de moyens considérablement accrus pour promouvoir ses thèses xénophobes et anti-européennes, au cœur même de la République.
Le ripolinage à l’œuvre depuis quelques années sur un parti cinquantenaire qui plonge ses racines dans le vichysme, la collaboration et le nazisme, ne doit pas faire illusion. La répétition à l’envi par Marine Le Pen, dans ses discours, des termes « peuple » et « nation » – « On est chez nous ! » – ne doit pas masquer l’imposture d’une formation politique qui pense et agit contre les valeurs et les principes républicains. L’irruption de nouveaux visages sur les bancs de l’Assemblée ne doit pas dissimuler l’activisme extrémiste de militants et d’élus, dans lequel s’inscrit historiquement et par essence le Front/Rassemblement national. Le racisme, l’antisémitisme, le négationnisme et le complotisme s’y sont toujours exprimés sans retenue, les instances dirigeantes du parti se contentant de « sévir », ponctuellement et stratégiquement, pour en cacher les expressions les plus scandaleuses.
Au plan historique, l’idéologie d’extrême droite est intrinsèquement destructrice. Ses expériences du pouvoir, en France ou ailleurs, ont de fait toujours engendré les pires violences. Par expérience, la Licra sait qu’il ne suffit pas de rappeler cette réalité pour créer un glacis protecteur autour, et désormais au sein, des institutions républicaines. Les alertes récurrentes, lancées par les associations antiracistes au cours des dernières décennies, n’ont pas suffi à empêcher le scénario catastrophe auquel nous sommes aujourd’hui confrontés. Nous entendons donc renforcer notre devoir de vigilance, d’alarme et d’interpellation.
Nous refusons que l’Assemblée nationale soit transformée en chambre d’écho des discours les plus funestes.
Nous refusons que le substrat idéologique de l’extrême droite prenne effectivement pied dans ce haut lieu de la République.
Nous refusons que la haine, sous une forme explicite, larvée ou codée, fasse son lit au cœur même de cette instance démocratique.
La Licra rappelle à la République et à ses élus qu’il est de leur responsabilité de lutter fermement contre le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, les discriminations, la remise en cause de l’égalité et les atteintes à la dignité.
La présence du Rassemblement national dans l’hémicycle ne doit pas lui permettre de donner vie à ses idées sinistres.
Il s’agit de bien plus que d’une question politique. Il s’agit de l’honneur et de l’avenir de la France.